Philippe Dessertine : L’économiste qui rêve de sauver la politique

Philippe Dessertine est un personnage surprenant. Lorsque nous le rejoignons dans un café bordelais, on s’attend à parler du maire sortant, l’écologiste Pierre Hurmic, et de sa politique ; on évoque davantage Aliénor d’Aquitaine. L’économiste nous prodigue presque un cours d’histoire, vantant les mérites de cette « ville protestante, frondeuse », qu’il dit « adorer ». Le professeur, intarissable, prend le dessus sur le candidat. En l’écoutant, on se demande ce que cet économiste réputé – il a été l’un des premiers à voir venir la crise des subprimes – vient faire dans cette galère.
Pourquoi quitter les amphithéâtres de la Sorbonne pour se lancer en politique, alors que celle-ci n’a jamais été aussi discréditée ? L’ancien membre du Haut Conseil des finances publiques, familier des plateaux de télévision, toujours éloquent sur l’état de nos comptes publics et l’aggravation de notre dette, sait qu’en officialisant sa candidature le 17 septembre, il a pris un risque. Mais ce n’est pas, insiste-t-il, une candidature de témoignage. « Je suis persuadé d’être la bonne personne au bon endroit au bon moment », glisse-t-il, souriant.

Il mûrit son projet depuis plus de cinq ans et y travaille avec une petite équipe depuis un an. L’idée germe vraiment lors de la victoire « seule contre tous » de son épouse, Laurence Dessertine, ex-adjointe d’Alain Juppé, aux élections départementales de 2021. Un autre élément l’a poussé à franchir le Rubicon : la naissance de ses petits-enfants. « Si je leur laisse une France ruinée, comment pourrais-je me regarder dans la glace à 80 ans ? » feint-il de s’interroger.

« L’économie représente le talon d’Achille des maires. »

Philippe Dessertine

Un comité de soutien est lancé au printemps 2025. En mai, Philippe Dessertine fait paraître un livre-programme, L’Horizon des possibles (Robert Laffont). Il y appelle à un « changement de modèle » et affirme, dans un entretien au Point : « L’ancienne civilisation tente de se maintenir, mais c’est perdu d’avance. » Toute ressemblance avec Emmanuel Macron et la fin de « l’ancien monde » n’est pas fortuite.

Alors que « nous passons d’un monde vertical à un monde horizontal », chacun, veut-il croire, a sa chance. Après tout, qui aurait pu imaginer qu’un homme de 39 ans soit élu, sans le soutien de l’un des deux grands partis, président de la République ? À Bordeaux, bastion historique de la droite depuis plus de soixante-dix ans, qui aurait misé sur une victoire d’un écologiste en 2020 ? Pierre Hurmic lui-même en a été le premier surpris.

Alors, être élu à Bordeaux en 2026, où il vit depuis plus de quarante ans, paraît tout sauf impossible à Philippe Dessertine. D’autant qu’il ne débarque pas de nulle part : il gravite autour du système politique depuis longtemps. Il connaît très bien Alain Juppé, ayant fait partie en 2009 de la commission du grand emprunt présidée par l’ex-maire de Bordeaux et Michel Rocard. Il a également de bonnes relations avec Édouard Philippe, qu’il a connu à la même époque — son épouse est déléguée départementale de son parti, Horizons — et il arrive souvent, raconte-t-il, que des responsables politiques […]