Aulas, Galzi, Dessertine… La société civile à l’assaut des élections municipales
Il est de ceux dont la notoriété crage local solide dans la capitale des Gaules, bâti au fil de ses trente-six années à la tête de l’Olympique Lyonnais (OL), Jean-Michel Aulas a franchi le Rubicon fin septembre, en se lançant dans la course aux municipales. Ce vrai-faux suspense, entretenu depuis des mois par l’homme d’affaires, a attisé curiosité et nervosité chez les états-majors politiques, tant sa popularité est écrasante dans la troisième ville de France. Aujourd’hui septuagénaire, il entend mettre sa renommée au service d’une alternance aussi large que possible, au-delà des traditionnelles frontières partisanes. Or, Jean-Michel Aulas a entamé sa campagne sur les chapeaux de roues, en ciblant d’emblée le « dogme », tenu pour responsable, selon lui, du bilan de la majorité écologiste sortante, menée par l’édile Grégory Doucet. De quoi semer le doute sur sa réelle indépendance politique ?
Jean-Michel Aulas fait partie de ces personnalités dont la notoriété s’enracine localement. Dans la capitale des Gaules, bâtie au fil de ses trente-six années à la tête de l’Olympique Lyonnais (OL), il a franchi le Rubicon fin septembre en se lançant dans la course aux municipales. Ce vrai-faux suspense, entretenu depuis des mois par l’homme d’affaires, a attisé curiosité et nervosité chez les états-majors politiques, tant sa popularité est écrasante dans la troisième ville de France. Aujourd’hui septuagénaire, il entend mettre sa renommée au service d’une alternance aussi large que possible, au-delà des traditionnelles frontières partisanes. Or, Jean-Michel Aulas a entamé sa campagne sur les chapeaux de roues, en ciblant d’emblée le « dogme », tenu pour responsable, selon lui, du bilan de la majorité écologiste sortante menée par l’édile Grégory Doucet. De quoi semer le doute sur sa réelle indépendance politique ?
Pour réaffirmer sa liberté, l’intéressé se revendique comme « sans étiquette ». Il assure même ne pas vouloir « être le représentant d’un bord politique ». Peu importe, au fond, que cinq partis de droite et du centre (Les Républicains, Renaissance, Horizons, le MoDem et l’UDI) se soient ralliés à sa candidature, lui permettant de tirer son épingle du jeu face à la gauche. « Ce qui me guide n’est pas une idéologie mais une conviction d’efficacité », a-t-il lancé, pour mieux se démarquer de ces appuis potentiellement encombrants aux yeux des électeurs. Reste que l’ultra-favori des sondages – passé des stades de football à l’arène électorale – doit faire face aux accusations de récupération.
« Dans un paysage partisan aussi désolant, il y a de la place pour quelqu’un dont la légitimité ne vient pas du milieu politique. »
Paul Bacot
En cause, son choix d’apparaître, il y a quelques semaines, aux côtés de Laurent Wauquiez, ex-président LR de la région Auvergne-Rhône-Alpes, et l’ancien chef de file des macronistes à Lyon, Thomas Rudigoz. Des accusations que l’entourage de Jean-Michel Aulas balaie : « Il est attaché au dépassement des clivages et met de côté les étiquettes. La vision de la ville qu’il porte nous rassemble au-delà de ce qui peut nous séparer », fait valoir Sarah Peillon, codirectrice de campagne et présidente de la fédération Renaissance du Rhône, précisant que la moitié de sa liste sera composée de personnes sans affiliation partisane.
Comme l’entrepreneur, plusieurs figures issues de la société civile ont décidé de se frotter aux électeurs en mars prochain. Et ce, à partir d’un même constat : les structures partisanes, vidées de leurs forces militantes et déconnectées du terrain, ne répondent plus à leurs attentes, et pas davantage à celles des citoyens. D’où leur refus de tout adossement aux partis, devenus de véritables repoussoirs dans l’opinion. Un choix qu’ils justifient en grande partie par l’éclatement de la vie politique : selon eux, huit ans après l’émergence du clivage entre les blocs central et nationaliste – sur les ruines de l’opposition droite-gauche – dans le sillage de la victoire d’Emmanuel Macron, aucune force ne s’impose véritablement. Ni à l’échelle nationale ni sur le plan local. « Dans un paysage partisan aussi désolant, il y a de la place pour quelqu’un dont la légitimité ne vient pas du milieu politique », souligne Paul Bacot. Lequel observe à cet égard « un regain d’intérêt pour les candidats mettant en avant des activités professionnelles indépendantes ».
Une philosophie qui a conduit l’économiste Philippe Dessertine à se lancer dans la bataille de Bordeaux (Gironde). Spécialiste des questions de finance internationale, le médiatique professeur des universités à Paris 1 Panthéon-Sorbonne met en avant sa liberté dans cette campagne, à rebours du « mode de fonctionnement complètement délétère des partis, détaché du quotidien et obsédé par la petite stratégie ». « La politique s’est coupée des citoyens », martèle l’expert, convaincu que sa démarche – comme celle des autres candidats étiquetés “société civile” – fait « revenir les gens vers le vote » et revigore le « fait démocratique ». Une recette d’autant plus efficace, estime-t-il, qu’il « n’est pas une figure politique » et « propose un projet », sans le moindre « marchandage électoral » ni « tractation » d’arrière-boutique, a-t-il affirmé ce vendredi dans un communiqué. Il n’empêche : conscient des réserves que pourrait susciter son absence d’expérience élective chez les Bordelais, Philippe Dessertine prévient, auprès du Figaro, que sa liste mêlera des « gens compétents » et des « personnalités capables de gérer la dimension politique » d’un mandat.
La défiance des Français à l’égard de leurs représentants, à l’exception notable des maires, les poussera-t-elle à tourner le dos aux partis traditionnels dans les urnes ? Si nombre de grandes villes résistent encore à cette tendance, les logiques partisanes y demeurant bien ancrées, force est de constater que certains « néopolitiques » en tirent une tout autre lecture, à l’instar de l’ancien journaliste de France 2 Olivier Galzi. Cinq ans après avoir quitté la télévision pour rejoindre la vice-présidence du groupe d’ingénierie et de gestion d’infrastructures Edeis, le voilà candidat dans la ville où il a effectué une partie de ses études : Avignon (Vaucluse).
Face au « ras-le-bol de la vie partisane » qu’il perçoit chez les électeurs, Olivier Galzi a pris la tête d’un mouvement présenté comme « citoyen » et « sans étiquette », même si Horizons et l’UDI lui ont apporté leur soutien. « Il y a une envie de départisation plutôt que de dépolitisation », insiste l’ex-présentateur, assurant que les « opérations Agora », menées dans les rues de la Cité des papes – où il va « voir et écouter les gens » –, rencontrent un accueil favorable. Certes, son positionnement n’a rien d’innovant : porté au pouvoir en 2017 sur la promesse d’une meilleure intégration de la « société civile » dans la vie politique, Emmanuel Macron avait, rappelle-t-il, tenté de « se placer au-dessus des partis ». Mais, observe-t-il, « il lui manquait les territoires, où l’on n’est pas obligé de passer par des tractations politiques pour réussir ».
Preuve que ces cas ne sont pas isolés : les candidatures de ce type se multiplient à travers le territoire. Comme celles de chefs d’entreprise – Christophe Batcabe à La Rochelle (Charente-Maritime) ou Pierre-Édouard Cardinal à Grenoble (Isère) – ou encore de figures du milieu associatif, à l’image de Pascal Durieux à Valenciennes (Nord). D’autres se préparent encore en coulisses. Parmi eux, l’ancien rugbyman Serge Blanco, qui lorgne la mairie de Biarritz (Pyrénées-Atlantiques). Programme bientôt en main, il ne devrait pas tarder à entrer dans la mêlée.



